6 arguments pour la conception responsable des services numériques
Quels sont les arguments à mettre en avant pour convaincre une organisation ou un client d’opter pour la conception responsable de son service numérique, son site web ou son application mobile ?
1. L’économie financière
Et oui, loin de coûter aux entreprises, une conception responsable des outils numériques aurait plutôt tendance à faire réaliser des économies. Même si cela peut prendre un peu plus de temps de réflexion au moment de la conception. Toutes fonctionnalités sont vraiment indispensables ? Comment se concentrer sur le réel besoin du client avant de penser aux espaces publicitaires ?
De plus, en réduisant la complexité des applications, sans pour autant diminuer leur qualité et leur pertinence, il y a un gain au niveau de la taille de l’infrastructure technique. Par exemple, après avoir repensé leur code, Linkedin a besoin pour fonctionner de 10 fois moins de serveurs. Cela se traduit en gain financier.
Enfin, très souvent, une application est changée, redéveloppée lorsqu’elle devient trop lente ou que son design est démodée. Les sites et applications conçus de façon sobre et responsable peuvent avoir une durée de vie supérieure aux autres. Ils peuvent accueillir des modifications sans changer toute la structure et s’adaptent aux évolutions technologiques.
2. L’Accessibilité
Les règles concernant l’accessibilité numérique peuvent se durcir. Sans attendre, les organisations ont intérêt à avoir des services numériques pensés pour tous.
Les retombées pour l’éditeur du site peuvent être étonnantes. Un site marchand avait opté pour deux versions différentes de son site, l’une qu’il pensait attractive et l’autre plus épurée dédiée à un public de malvoyants. Il a été bien surpris par ses résultats de fréquentation. Le site plus sobre recevait une audience inattendue, des voyants y compris !
3. Un levier d’innovation
Nous vivons dans un monde de plus en plus complexe. Nous utilisons de plus en plus de ressources. Concevoir de manière responsable peut devenir un levier d’innovation. Ajoutons les contraintes suivantes à la conception des services numériques : opter pour des solutions sobre, efficiente et consommant moins de ressources tant en garantissant une expérience utilisateur améliorée. Cela tombe bien, les developpeurs aiment les challenges techniques. Et si on parlait de manière positive ? Remplaçons le mot “contrainte” par “bonnes pratiques” !
Lorsque Google est arrivé avec son champs de recherche simple au milieu de la page, il a balayé en quelques semaines Yahoo avec son “portail” lourd qui propose sans doute trop de fonctionnalités très différentes.
4. Les retours d’expériences
Le meilleur argument est l’exemple. Si vous parvenez à trouver l’exemple parfait qui illustre vos propos et qui démontre que passer à une conception responsable de votre produit peut également vous faire générer du profit, vous aurez plus de poids face à un client sceptique.
Voici quelques exemples qui peuvent vous servir :
- Le succès et l’efficacité d’une barre de recherche au milieu d’une page vide par Google face au portail lourd de Yahoo
- La simplicité de réservation d’un billet de train sur TrainLine (ex-CaptainTrain) par rapport à Voyages SNCF.
5. Limiter l’impact sur l’environnement
Le numérique représente aujourd’hui entre 3 et 5% des émissions de CO2 mondiaux. Une grande partie de cette pollution est générée à la production des terminaux. 90% de la pollution est réalisée lors de la production d’un smartphone par exemple. Nous ne voyons pas cette pollution car elle est produite loin de chez nous, par l’extraction des minerais au Congo ou par les usines en Chine.
Par conséquent, le levier pour réduire l’impact environnemental du numérique est d’allonger la durée de vie des machines et réduire donc son renouvellement ou l’achat de neuf.
Aujourd’hui nous ne jetons pas un portable parce qu’il ne fonctionne plus mais parce qu’il rame. Les applications que nous utilisons au quotidien sont de plus en plus lourdes et demandent de plus en plus de puissance à nos machines. Il y a 50 ans, on envoyait des hommes sur la lune avec un ordinateur qui avait une capacité de stockage de 70 Ko et une mémoire vive de 4 Ko. Aujourd’hui un site web pèse plusieurs Méga-octets (2300 Kilo-octets selon cette étude).
En réduisant ce phénomène “d’obésiciel” (contraction de “obèse” et “logiciel”), nous essayons de limiter la consommations de ressources, le temps d’usage et donc le renouvellement des machines.
6. L’avenir de nos enfants
Nous sommes sur une trajectoire qui nous amène à +5 degrés à la fin du siècle. L’été 2019 a été marqué par plusieurs phénomènes de grandes ampleurs et qui ont fait la Une des médias : sécheresses et canicules (et pas qu’en Europe), feux de forêts notamment l’Amazonie ou l’ouragan Dorian. Ces phénomènes sont de plus en plus fréquents ou de plus grandes ampleurs.
Nous ne sauverons pas la planète en concevant de manière responsable mais au moins nous limiterons l’impact environnemental de nos activités numériques.
Parler de l’avenir de nos enfants dans ce contexte est un message qui ne laisse personne insensible. Agissons dès aujourd’hui pour réduire notre consommation de ressources pour espérer leur laisser un monde le moins dégradé que possible. De plus, réfléchissons à concevoir des outils low-tech permettant d’aider ces futures générations à une certaine forme de résilience.
Hélène Maitre, facilitatrice agile et Richard Hanna, développeur, Fairness