Catégorie : Energie

Smart grid : miser sur les standards pour garantir l’interopérabilité

m2ocity exploite un réseau de télé-relève interopérable constitué d’infrastructures de télécommunications « Machine to Machine » (M2M) pour raccorder des compteurs d’eau, de gaz ou d’autres types de capteurs autonomes en énergie et communicants (smart meter) par radio. Christian Gacon, son directeur technique nous explique pourquoi il est crucial de bâtir un standard garantissant l’interopérabilité des composants d’une grille de télérelève (compteurs et infrastructure).

GreenIT.fr : En quoi la standardisation est-il un levier essentiel au développement du télérelevé ?
Christian Gacon : Les distributeurs et les acteurs nationaux de la filière gaz, les représentants des consommateurs, ainsi que les principaux opérateurs du service public local de l’eau sont convaincus des bénéfices que peuvent apporter à l’ensemble de la chaîne de valeur ce nouveau procédé de collecte et de transmission des données de consommation. Ainsi, dans sa délibération du 21 juillet 2011, la CRE a approuvé la proposition de GrDF de lancement d’une phase de construction d’un système de comptage évolué. Le parti technologique que prendra GrDF sur le télérelevé des compteurs, compte tenu du poids industriel de l’entreprise, donnera inévitablement au marché une orientation non contraignante, mais néanmoins directrice. Dans ces conditions, il faut assurer à des acteurs disposant de ressources moindres, comme les entreprises locales de distribution d’électricité et de gaz (ELD), un accès à la technologie de télérelevé par la radio fréquence (RF) dans des conditions économiques optimales. Cependant, le développement du télérelevé RF fait face à un obstacle majeur : l’absence de standardisation.

Quelle est la conséquence de cette absence de standardisation ?
Les différents équipements de comptage et/ou de communication sont rarement interopérables. Ceci a un impact négatif à la fois sur les coûts (en limitant la possibilité d’économies d’échelle sur les matériels produits par les différents équipementiers) et sur la fluidité du marché (en rendant le gestionnaire de réseaux« captif » de son choix de matériel pour de nombreuses années). La standardisation est un levier essentiel pour parvenir à l’interopérabilité des équipements qui, seule, permettra d’accélérer le développement et la généralisation d’une technologie très attendue par de nombreux acteurs des filières eau et gaz en France : le télérelevé RF.

Quelles sont les tendances technos dans le domaine du télérelevé ?
En matière de télérelevé des compteurs (smart metering), c’est-à-dire la relève à distance des compteurs évolués d’énergie (gaz ou électricité) et d’eau, il existe deux grandes options technologiques :

  • le courant porteur en ligne (CPL) qui utilise l’infrastructure du distributeur d’électricité pour transporter localement l’information entre le compteur communicant et un concentrateur. Ce dernier regroupe les informations issues de plusieurs compteurs pour l’acheminer ensuite jusqu’à un système informatique central de collecte et de traitement de ces informations (en utilisant des moyens télécoms classiques : GSM, GPRS, etc.). C’est le choix technologique retenu pour le grand projet de télérelevé en Italie, ainsi que pour le projet Linky en France ;
  • la radio fréquence (RF) utilise une transmission radio entre les compteurs communicants des usagers et une passerelle installée localement sur un « point haut » (exemples : château d’eau, toit d’immeuble, etc.). Les avantages du télérelevé RF « sans fil » sont de deux ordres. D’une part, l’autonomie en énergie du compteur communicant, qui est muni d’une batterie d’une durée de vie de 10 ans et plus, sans intervention de maintenance. D’autre part, l’indépendance vis-à-vis de l’infrastructure du distributeur d’énergie pour la transmission locale. Ainsi, il est possible de recourir aux services d’un opérateur télécom pour gérer cet aspect. C’est le choix technologique retenu en France pour le télérelevé d’un million de compteurs et pour le gaz (choix de GrDF pour son projet Gazpar).

Où en est-on de la standardisation du télérelevé en France ?
Dans le cadre du projet d’étude d’un système de comptage évolué lancé par GrDF, le groupe de travail E17z a été créé au sein de l’AFNOR en avril 2012. Ce groupe rassemble des distributeurs de gaz (GrDF, le Syndicat professionnel des entreprises gazières non nationalisées – SPEGNN), des distributeurs d’eau (Veolia Eau, Lyonnaise des Eaux, Eau de Paris, Saur), des fournisseurs d’équipements (Elster, Itron, Sappel, Homerider, Adeunis-RF, Kerlink, Sagemcom, Ondeo, Panasonic) et des opérateurs télécom (m2ocity, Orange). Son objectif est de faire émerger un standard applicable pour le télérelevé RF. Il est ainsi en charge d’élaborer un guide d’application des normes européennes « Wireless MBUS » permettant l’interopérabilité des systèmes et, ce, en traitant des besoins de relevé à distance des compteurs d’eau et de gaz.

Quel est le programme de ce groupe de travail ?
Ce groupe de travail va publier un guide d’application précisant les modalités de connexion des compteurs communicants avec les réseaux de télérelevé ainsi que les informations essentielles devant être transmises par tout réseau de télérelevé. Ce guide définit l’interopérabilité minimum garantie, socle fondamental sur lequel vont devoir maintenant s’accorder les différents acteurs du télérelevé RF (opérateurs télécoms, équipementiers et gestionnaires de réseaux).

Quel poids sera donné au travail du groupe ?
Le travail engagé et les recommandations du groupe de travail E17z sur la standardisation permettent d’ores et déjà aux distributeurs d’engager des expérimentations avec pour objectif de démontrer, sur le terrain, la pertinence et la faisabilité des choix technologiques retenus pour le télérelevé RF des compteurs de gaz. Plus tard, bien d’autres questions se poseront, comme celle du statut d’opérateur de télérelevé pour le distributeur de gaz (pour son seul besoin sur le gaz). Celui-ci devra choisir – ou non – de confier à un opérateur télécoms l’exploitation de l’infrastructure et des systèmes télécoms mutualisés pour les compteurs de gaz, d’eau ainsi que nombreux autres objets communicants RF.

Source : GreenIT.fr

Frédéric Bordage

Expert en green IT, sobriété numérique, numérique responsable, écoconception et slow.tech, j'ai créé le collectif Green IT en 2004. Je conseille des organisations privées et publiques, et anime GreenIT.fr, le Collectif Conception Numérique Responsable (@CNumR) et le Club Green IT.

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