Linky ou pas ?
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Au départ, l’idée d’un compteur intelligent a de quoi séduire. Permettre aux utilisateurs de surveiller leur consommation en temps réel, de détecter des dysfonctionnements, de bénéficier de grilles tarifaires avantageuses, d’avoir une facturation réelle et non estimée, de bénéficier d’une gestion d’abonnement à distance (pouvoir augmenter ou diminuer la puissance disponible). Tous ces avantages permettaient d’envisager l’avenir de Linky avec sérénité.
Mais les premiers tests grandeur nature ont refroidit les enthousiasmes et les polémiques se sont multipliées. A tel point que certaines collectivités locales se sont opposées au déploiement de Linky sur leur territoire (Paris fin 2011).
Alors, fin de la saga Linky ? Rien n’est moins sûr ! Et en ce début 2012, le débat entre les avantages et les inconvénients semble plus incertain que jamais …
Economies d’énergie et impact environnemental
Tout d’abord, un des objectifs des compteurs intelligents et plus généralement des smart-grids est de réduire l’impact environnemental.
Côté ERDF, le déploiement de Linky représente un meilleur équilibrage du réseau par une meilleure gestion de la demande. Et qui dit meilleur équilibrage, dit réduction des pertes en lignes (-28%) et donc production (et pollution) moindre pour un même service. Cet équilibrage plus dynamique de la charge du réseau devrait aussi permettre le développement des productions délocalisées, notamment à base d’énergies renouvelables (ENR). Autre avantage indéniable, la réduction des déplacements pour la gestion de la maintenance et des abonnements qui pourront être fait à distance. Cela représente 35 millions de km en moins sur 20 ans (soit environ 175 tonnes de CO2 évitées par an) !
Côté consommateurs, les avantages sont moins flagrants. En effet, les tests grandeur nature n’ont pas pu démontrer que cela faisait faire des économies d’énergie aux utilisateurs. Il faut dire qu’il n’est pas évident de rester le nez sur son compteur, surtout si celui-ci est à l’extérieur et ne dispose pas d’affichage déporté. Quant aux relevés « en temps réels », ceux-ci n’ont de pertinence qu’en fonction de valeurs de référence et demandent donc du temps pour disposer d’un historique exploitable.
Avantages économiques
Un autre objectif des compteurs intelligents et plus généralement des smart-grids est de faire des économies « tout court ».
C’est a priori tout à fait envisageable pour ERDF ! En effet, la réduction des déplacements devrait entraîner automatiquement une réduction de personnel. De plus, la réduction des pertes en ligne représente une réduction importante de ce manque à gagner.
Pour les consommateurs, le seul avantage direct sera d’être facturé sur sa consommation réelle, et non sur une consommation estimée (et souvent sur-évaluée). Pour ceux qui réussiront à maîtriser une grille tarifaire digne d’un horaire SNCF, le report des tâches énergivores sur les plages à bas tarif pourra également apporter quelques économies. Mais soyons réalistes, pour la plupart d’entre nous, ce système de grille tarifaire qui rendra l’énergie plus chère au moment où on en a le plus besoin (le chauffage le matin en hiver par exemple) risque d’augmenter la facture. Enfin, d’un point de vue global, on ne peut pas considérer que les réductions de personnel chez ERDF soit une bonne chose pour l’économie …
Et finalement, la grande question économique liée à Linky reste : qui va payer ces nouveaux compteurs ? Suite aux déclarations du ministre Eric Besson fin 2011, on pensait la question tranchée : compte tenu des économies réalisées par ERDF, l’installation de Linky serait gratuite pour les usagers. Mais depuis, c’est silence radio ! Aucun communiqué officiel d’ERDF n’est venu confirmer ces bonnes dispositions.
Confort et sécurité
Reste les aspects « confort et sécurité » liés à l’utilisation de « réseaux intelligents ».
Côté exploitant, ce type de réseau permet une meilleure gestion des pannes et des services. Ainsi, il suffit de détecter que des compteurs ne communiquent plus sur un secteur donné pour identifier une coupure de réseau. La gestion à distance devrait également permettre une gestion des abonnements beaucoup plus facile (pour augmenter ponctuellement la puissance disponible par exemple). Par contre, plus un réseau est complexe et plus il est vulnérable. Et ce type de réseau sera une cible de choix en cas de cyber-guerre ou de cyber-terrorisme.
Côté utilisateurs, cette intrusion des réseaux intelligents dans les foyers peut inquiéter. Néanmoins, en ce qui concerne Linky, les protocoles utilisés (CPL-G3 et GPRS) semblent robustes, à tel point que l’ITU vient de standardiser le CPL-G3 comme protocole de référence pour les smart-meters électriques. Mais si ces aspects de sécurité semblent maîtrisés, la menace viendra peut être plus de nos mauvaises habitudes, comme celle de payer sa facture au dernier moment. En effet, parmi les opérations pouvant être effectuées rapidement et à distance grâce à Linky, il y a la coupure de la ligne ! Et nul doute qu’en cas d’impayé ou de litige, on ne pourra plus compter sur le délai d’intervention ou la bienveillance des agents d’ERDF !
Alors, Linky, pour ou contre ?
Sources autres que les liens cités dans l’article :
Rencontre avec Marc Boillot, Directeur stratégie et grands projets chez ERDF (Le Moniteur – Janvier 2012)
Rapport CRE Juin 2011
Yann Hamonic
Ingénieur INSA, j’ai passé 3 ans chez un éditeur de logiciel, puis 10 ans en SSII, avant de lancer ma propre structure. J’ai ainsi pu expérimenter de nombreux métiers (de développeur à chef de projet, en passant par l’intégration, les tests, le pilotage et même la Hotline !), et j’ai évolué dans des secteurs divers (PME de services, Grandes entreprises industrielles, Services Publics). Passionné par la nature et l’environnement, je me suis intéressé au Green IT à partir de 2007. Cela m’a permis de concilier mes passions et mes compétences professionnelles au point de vouloir en faire mon activité principale. J’ai ainsi démarré un projet de création autour du conseil en Green IT en 2010, et la société AWALENN a finalement été créée en 2012 (AWALENN est membre de l’AGIT). Je suis contributeur à GreenIT.fr depuis l’été 2011.