Après le logiciel libre, le matériel ouvert et libre
Nous avions introduit la notion de hacking dans un précédent article et vu comment certains mouvements expérimentaient d’autres manières de concevoir et d’utiliser les objets de la vie courante.
L’open hardware (ou matériel ouvert) en est un exemple concret. Mouvement comparable à celui du logiciel libre, l’open hardware chamboule le monde de la conception du matériel électronique. Là où les sociétés avaient l’habitude de garder secrets les plans électroniques, les programmes, les nomenclatures de pièces et tous les brevets, les défenseurs du matériel ouvert prônent le partage.
Les avantages sont multiples : contrôle de la technologie par les utilisateurs et les concepteurs, réparation facilitée, meilleure vision sur l’approvisionnement des pièces, amélioration continue du matériel par la communauté…
Le matériel informatique et électronique souffre en effet de maux qui ne sont pas négligeables pour l’environnement : obsolescence programmée, réparation impossible…
L’ouverture est peut-être une solution. Cependant elle n’est pas nouvelle (des plans de réparation existent par exemple depuis très longtemps) mais la miniaturisation, les méthodes de montage (tel le sertissage des boitiers) et les circuits de plus en plus complexes ont écarté les électroniciens et les utilisateurs du matériel. L’open hardware redonne en quelque sorte la main aux utilisateurs sur l’électronique, et va même plus loin, en rendant accessible le domaine aux non initiés.
Les principaux acteurs du mouvement ont dernièrement proposé une définition du concept avec l’"Open Source Hardware (OSHW) Statement of Principles and Definition v1.0" (OSHW ) :
"Open source hardware regroupe les conceptions "Hardware" réalisées publiquement et disponibles de manière à ce que n’importe qui puisse étudier, modifier, distribuer, créer et vendre un "design" ou un produit basé sur ce design.
La source du produit hardware, le design duquel le produit est issu, est disponible sous un format choisi pour permettre de faire des modifications.
Idéalement, open source hardware utilisera des composants et matériaux facilement approvisionnables, des procédés de fabrication standard, des infrastructures libres, des contenus libres de droit et des outils de design "Open-source" pour maximiser la possibilité donnée à d’autres de concevoir ou utiliser un produit hardware.
Open source hardware permet à quiconque d’avoir le contrôle sur leur technologie du moment qu’elles partagent leur savoir et encourage le commerce au travers de l’échange de design libre"
Le succès de la plate-forme ouverte Arduino est la preuve de l’engouement croissant pour ce mouvement. On peut maintenant lister une multitude de projet basés sur cette plateforme. Par exemple un module de mesure de la consommation de compteur électrique (City Watt ) ou des ateliers d’initiation (Do-It-With-Others!) dans plusieurs villes. Plus globalement la liste Wikipedia vous permettra de voir de nombreux exemples de projets basés sur l’Open Hardware.
Les plus sceptiques diront que c’est encore un mouvement de geek et que ce n’est pas un modèle économique viable ! Tout d’abord, comme pour le logiciel libre il ne faut pas confondre libre et gratuit ("free as in speech, not as in beer" comme le dit Richard Stallman). La société Arduino par exemple se finance sur le conseil autour du design. En France on peut citer la société Hedera Technology qui propose des serveurs avec des plans de châssis ouverts (mais basé sur des cartes mères grands publiques) mais qui se finance sur les services.
L’ouverture du matériel n’en est qu’à ses débuts mais l’avenir est prometteur. C’est une nouvelle façon de voir nos appareils électroniques. Cela permet pour les utilisateurs d’une part la réappropriation des objets et d’autre part la possibilité de réutiliser du matériel obsolète dans de nouveau projet. Pour les acteurs industriels, cela offre de nouveaux modèles économiques et surtout la possibilité de combattre l’obsolescence. Au final, l’open hardware est certainement une piste à ne pas négliger !
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