Empreinte carbone et incertitudes
Un chercheur du Green Design Institute de l’université américaine Carnegie Mellon a publié en décembre une étude portant sur l’incertitude du calcul de l’empreinte carbone des équipements électroniques. En examinant le cas d’un produit complexe – un serveur rack IBM datant de 2008 – ce chercheur a pu démontrer que le calcul d’une empreinte carbone n’est pas un exercice aussi précis qu’on pourrait le penser. Les étiquettes des fabricants sur le matériel que vous achetez sont donc à considérer avec précaution.
En résumé, l’étude annonce une incertitude de l’ordre de ±15% pour la phase de production/livraison et de ±35% pour le cycle de vie entier du produit (« cradle to grave », incluant phase d’utilisation et logistique associée). L’auteur précise que l’incertitude réelle est probablement beaucoup plus grande en raison de limitations dans les données disponibles pour ses calculs.
Dans la phase de production, un nombre relativement restreint de composants contribue à la majeure partie de l’incertitude ; la livraison par voie aérienne est également un facteur important qui varie considérablement en fonction des lieux d’assemblage et de livraison. On peut cependant quantifier l’impact de cette phase par un simple chiffre avec un intervalle de confiance.
Le cas de la phase d’utilisation est différent. Tout d’abord, elle domine avec environ de 94% de l’empreinte carbone totale. En effet, cela s’explique par la durée de vie relativement longue d’un serveur et son utilisation continue. C’est en fait dans cette phase que les incertitudes seront les plus grandes, bien plus que pour la production. L’auteur de l’étude, Christopher Weber, justifie : « Il est impossible de savoir avec certitude combien de temps et comment un produit sera utilisé. En outre, la variabilité du mix électrique des différents marchés mène à des impacts largement différents, même en utilisant le produit de la même manière. » En effet, lorsque l’on considère que le mix électrique d’un pays peut entraîner des variations allant jusqu’à 50% pour l’empreinte carbone d’un même produit, il devient clair que communiquer une simple moyenne aux clients sur la phase d’utilisation n’est pas pertinent. Sans compter les différents scénarii d’utilisation qui changent eux aussi la donne…
L’auteur propose donc aux fabricants de communiquer aux consommateurs différentes estimations de l’empreinte carbone en faisant varier d’une part le scénario d’utilisation du produit, et d’autre part la localisation du client.
On retiendra donc que si les TIC occupent une place importante dans votre activité, mieux vaut réaliser vous-même les calculs. Les estimations des fabricants ne suffisent pas si, par exemple, elles ne tiennent pas compte des différences entre les distances et méthodes de livraison. Autant d’incertitudes qui soulignent le besoin croissant de solutions sophistiquées pour gérer son empreinte carbone.